Les réfugiés de Metz-Bellecroix
Vent de panique pour les services de l’Etat en Moselle. Après leur départ de Metz Bellecroix, une partie des demandeurs d’asile devraient être logés à Dieuze dans d’anciennes casernes militaires.
« Les services de la préfecture ont engagé depuis plusieurs semaines un important travail de recensement de places d’hébergement pour les demandeurs d’asile installés à Bellecroix. A ce jour, un nombre de places suffisant pour assurer l’hébergement des 369 demandeurs d’asile a été recensé. Les transferts ont débuté dès le 24 septembre et 162 personnes ont d’ores et déjà intégré une structure d’accueil en Lorraine » avaient assurés les services de la Préfecture de Moselle dans un communiqué.
« Des familles de 8 à 12 enfants que les parents poussent à voler »
Oui mais. La Préfecture a prévu de reloger des demandeurs d’asile, pour la plupart originaires d’Europe de l’Est dans des appartements anciennement occupés par des militaires du 13e RDP de Dieuze. Aujourd’hui les logements de fonction sont vides et laissés entre les mains de l’Etat. Selon la Préfecture, le coût d’hébergement des demandeurs d’asile sera assuré par les services de l’Etat et ne coûtera rien aux collectivités locales.
Le maire UMP de la commune ne veut pas de ces demandeurs d’asile et a convoqué les habitants pour bloquer la décision de la Préfecture. « On a supporté beaucoup de choses jusqu’à maintenant. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Il est hors de question d’accueillir ces réfugiés » a commenté sur France 3 Lorraine le maire de Dieuze, commune de Moselle située au sud de l’agglomération de Metz, dans une zone rurale plutôt reculée. Lors d’une réunion avec les habitants il aurait tenu des propos ambigus. « Ce sont des familles de 8 à 12 enfants que les parents poussent à voler » affirment des tweets envoyés par un internaute présent sur place.
Le maire de Dieuze hostile à la venue des demandeurs d’asile devrait s’entretenir avec le Préfet de Lorraine demain. En attendant, les services préfectoraux assurent que les solutions d’hébergement sont compliquées à trouver.
Le maire « stigmatise » selon le Front de Gauche
Le Front de Gauche a quant à lui dénoncé la stigmatisation de cette population en provenance d’Europe de l’Est. Le parti d’extrême gauche assure que le maire « n’explique pas » suffisamment l’origine de ces demandeurs d’asile. Selon le FDG, le maire de droite aurait monté les habitants contre ce projet d’hébergement.
Du côté du Front National, le parti met en garde les habitants de Metz. « Ils vont obtenir un répit de courte durée car le flot de clandestins n'est pas près de se tarir. 40 arrivées par jour selon le Maire de Metz Dominique Gros » assure le FN de Moselle dans un communiqué. Il demande par ailleurs à M. Meddah, Préfet de Moselle, « d'opérer un véritable contrôle aux frontières pour démanteler les réseaux de passeurs, et d'accélérer le traitement des demandes d'asile pour faire le tri entre les « demandeurs d'allocations » venant profiter des largesses de notre système d'accueil, qui doivent être reconduits chez eux, et les réfugiés véritables. »
Campement de réfugiés Metz-Bellecroix
le Pôle asile ferme
C’est par un courrier daté du 6 septembre et adressé au préfet de Moselle que Denis Reinert, président de l’AIEM, a annoncé son intention de fermer la plateforme d’accueil des demandeurs d’asile de Metz-Bellecroix.
La nouvelle est tombée, hier, en fin de matinée. Installée à Metz-Bellecroix, la Plateforme d’accueil des demandeurs d’asile ( Pada) fermera temporairement ses portes à partir du vendredi 14 septembre au soir.
Pour des raisons économiques, la structure avait quitté, en décembre dernier, la rue du Pont-Moreau, pour s’installer dans ces locaux.
Agréée par l’ Ofii (Office français d’immigration et d’intégration), la Padaest le maillon clé dans le parcours du combattant du demandeur d’asile. C’est là que le migrant se fait enregistrer comme demandeur d’asile. S’enclenchent, ensuite, les procédures au niveau de la préfecture et du 115 pour le logement. Le délai ne peut excéder vingt et un jours entre la demande en préfecture et l’arrivée du dossier à l’ Ofpra (Office français de protection des réfugiés et des apatrides).
« Cette situation nous préoccupe tous, annonce Denis Reinert, président de l’AIEM (Association d’information et d’entraide mosellane). Les gens me demandent souvent : Pourquoi faites-vous venir autant de demandeurs d’asile ? Mais il s’agit d’un flux qu’on ne gère pas et qui s’est fortement aggravé ces derniers temps, jusqu’à ce que l’on soit submergé. »
Pour preuve, hier, l’association comptabilisait 445 personnes non hébergées (206 adultes et 164 enfants composant des familles ainsi que 75 adultes isolés). « Lundi matin, nous avons vu arriver vingt-six personnes, dont un mineur isolé », renchérit Denis Reinert. Une situation préoccupante au point que l’AIEM a décidé de suspendre son Pôle asile, situé rue de Stoxey, à Metz-Bellecroix.
« Le droit d’asile est prévu par la Constitution. Nous ne sommes pas sur de l’humain, mais sur du droit, estime Denis Reinert. Il ne nous appartient pas de décider si l’on doit laisser rentrer ces demandeurs d’asile ou non. Actuellement, nous sommes tellement submergés par les demandes que nous n’arrivons plus à les satisfaire ni à assurer notre mission d’accueil pour informer ces personnes sur leur situation administrative. Notre mission ne se résume pas seulement à de l’accueil mais aussi à de l’accompagnement. »
« Mission mise en péril »
Évoquant la situation actuelle, le président de l’AIEM constate : « Tout avait à peu près bien fonctionné jusqu’en septembre 2011, les flux étaient maîtrisés et nous n’avions pas eu de grosse catastrophe sanitaire. Mais les flux ont rapidement augmenté. Nous n’aurions jamais imaginé qu’il puisse y avoir un tel engorgement. Aujourd’hui, 80 % des arrivants proviennent des Balkans (Albanie, Monténégro, Kosovo, Bosnie et Serbie). En suspendant la Pada, le message est double : alerter les pouvoirs publics en leur faisant savoir que l’on ne peut pas assumer. Il s’agit aussi d’informer à l’autre extrémité de la chaîne, à savoir les réseaux de passeurs, que ce n’est plus la peine de venir ici et qu’à Metz, les dossiers ne seront plus enregistrés. Notre mission est mise en péril. Il serait irresponsable de ne pas alerter l’autorité de tutelle sur cette situation. S’il existait une solution simple, les pouvoirs publics l’auraient déjà adoptée depuis longtemps. Cette situation devient difficile et périlleuse. Nous ne pouvons plus la gérer… »
Sans compter le ras-le-bol des riverains de la rue du Gers qui ont de plus en plus de mal à supporter cette promiscuité. « Entre le bruit, les odeurs, les poubelles jetées partout, ça devient terrible. On ne peut même plus ouvrir nos fenêtres, s’indigne Francis. Et quand on se met à la fenêtre, on les voit faire leurs besoins n’importe où… » Un mécontentement largement partagé par bon nombre d’habitants qui envisagent même de faire une pétition contre l’installation de ce campement.
Ce matin, le préfet Nacer Meddah se rendra notamment dans les locaux de l’ Ofii et de la Pada. À suivre…
Delphine DEMATTE. photo et article RL